Le Labo Télé prend position contre le racisme systémique et les situations d’oppression ainsi que de harcèlement sexuel qui persistent dans notre société et dans le cadre de nos institutions universitaires. La situation actuelle nous oblige à donner voix à des questions pressantes, à nous demander ce que nous devrions inclure davantage dans nos pratiques ainsi qu’à lutter contre la banalisation de ces violences.
Dans la foulée de la plus grande visibilité des mouvements populaires qui dénoncent les inégalités systémiques, nous croyons nécessaire de présenter, en ces quelques paragraphes, notre positionnement par rapport à la nécessité de nommer les possibles pièges dans le parcours de l’étudiant.e, des professeur.e.s et des chercheur.e.s sur le plan de l’interdépendance des dimensions identitaires et formatives.
Étudier la télévision et les séries télé est aussi une manière de se sensibiliser aux questions liées à la visibilité et à l’invisibilité de thèmes cruciaux dans l’histoire récente ainsi que dans les sociétés contemporaines. Les différents types d’objets produits par les industries médiatiques et les représentations, tout comme les enjeux de production nationale et transnationale, demandent aux chercheur.e.s de naviguer des eaux chargées de stéréotypes, de relations de pouvoir, d’oppressions, de silences. Les méthodologies de recherche sont également à comprendre comme inscrites dans la culture qui les a développées. Il faut être conscient des biais qui sont présents dans notre manière d’analyser et de partager nos connaissances. Il faut être conscient aussi de qui a les moyens, en tant que chercheur.e, de pouvoir "produire de la connaissance" et la partager, ce qui perpétue les biais et qui exclut des approches qui ne reproduisent pas les modèles légitimés, "traditionnels", "blancs". Finalement, nous devons être conscient.e.s des objets et des modèles de production qui sont choisis et de ceux qui sont exclus des analyses.
Nous sommes sensibles et ouvert.e.s à mieux comprendre les nombreuses situations- pièges que l’étudiant.e risque de rencontrer dans son parcours au sein de l’institution. Nous oeuvrons pour les anticiper, pour les corriger et notamment nous nous engageons à lutter contre: (1) les débordements arbitraires qui peuvent découler de la relation pédagogique et de toute relation d’autorité, incluant l’intimidation (2) les problèmes liés à l’inclusion et à la hiérarchie dans l’organisation de colloques et autres événements; (3) les mécanismes d’exclusion ou de marginalisation dans le processus d’écriture et de publication qui, dans l’état actuel, tendent à consolider un status quo patriarcal et blanc.
Les solutions que nous proposons sont les suivantes, sur trois niveaux:
- conversations internes: développer une réflexion sur nos privilèges et nos oppressions ainsi que sur les silences dans le but de comprendre comment opérer positivement pour corriger les failles d’un système qui est oppressif, au niveau micro et macro;
- action: la création d’une bibliographie participative et inclusive en accès libre pouvant être utilisée comme base de données diversifiée de référence sur les études télévisuelles; transparence et valorisation des travaux d’étudiant.e.s. Élargir les possibilités que nous ouvrons aux étudiant.e.s des différents cycles, notamment par la mise en place de bourses pour personnes racisées voulant étudier la télévision. S'assurer ainsi que les étudiant.e.s racisé.e.s puissent poursuivre leurs études à l'université et aient les moyens nécessaires pour écrire et publier leurs articles.
- recherche: mieux délimiter, mieux questionner, mieux comprendre les espaces à combler tant sur le plan des contenus que sur le plan des méthodes.
En tant que groupe de chercheur.e.s et d’étudiant.e.s, nous nous interrogeons, sur le plan individuel et sur le plan de notre travail commun, à partir des questions suivantes:
Comment. Comment un groupe de recherche universitaire peut-il devenir un espace pour la production de la pensée critique? Comment faire d’un laboratoire voué à la formation de futur.e.s chercheur.e.s un lieu qui stimule une recherche plus nuancée et propice à l’apprentissage non seulement de théories et de méthodes, mais aussi de conscience et éthique?
Quoi. Quelles sont les pratiques que notre laboratoire encourage? Avec quelle fréquence intégrons-nous dans notre recherche des approches décoloniales, identitaires et politiques?
Qui. Sur qui notre laboratoire se base-t-il? Comment décentraliser la prise de décision, tout en restant un espace universitaire en encourageant la responsabilisation, l’autonomisation et la valorisation, ainsi que la prise de pouvoir de chacun.e.